Le régime local Alsace-Moselle géré par les organisations syndicales est la preuve évidente qu’une sécurité sociale intégrale et solidaire est applicable pour l’ensemble de la population
Un peu d’histoire – Les origines du particularisme alsacien-mosellan : les alternances impérialistes
- Le Saint-Empire romain germanique se forme au Xème siècle.
- À la fin de la Guerre de Trente Ans les Traités de Westphalie actent l’annexion par la France de l’Alsace et du duché de Lorraine.
- L’Empire Romain disparaît officiellement en 1806 sous la pression de Napoléon.
- La défaite française de 1871 aboutit au rattachement à l’Allemagne de l’Alsace et de la Lorraine.
- La défaite allemande entraîne leur restitution en 1919, mais avant l’arrivée des troupes françaises l’Alsace participe à l’épisode révolutionnaire qui fera passer l’Allemagne de l’Empire à la République, ce qui conduira à maintenir les lois sociales en vigueur depuis trente ans ainsi que d’autres dispositions auxquelles la population reste très attachée, comme le concordat.
Les prémices bismarckiens
En Alsace les sociétés de secours mutualistes démarrent très tôt en raison d’une industrialisation précoce ; à la veille de l’annexion de 1871 existent 374 organisations mutualistes autorisées par le Second Empire français sous couvert d’un patronat paternaliste.
Le chancelier Bismarck entreprend des réformes sociales visant à empêcher la poussée des structures syndicales et politiques du mouvement ouvrier allemand, sur le modèle des caisses de secours mutuel existantes en Alsace-Lorraine mais renforcé par leur caractère obligatoire (Loi sur l’assurance maladie en 1883, accidents du travail en 1884, invalidité et vieillesse en 1889, le tout regroupé dans le code des assurances sociales impériales de 1911)
- Financement et prestations : 2/3 ouvriers, 1/3 employeurs
- Adhésion obligatoire au dessous d’un certain plafond
- Soins, médicaments et hospitalisation entièrement gratuits sans avance des frais
- Indemnité journalière de 50 % du salaire à compter du 4ème jour et pendant un mois
- Invalidité et vieillesse sont surtout traitées sous l’angle de la prévention ; pension versée à 70 ans
- Gouvernance : Représentation ouvrière et patronale proportionnelle à la participation financière
1945 : Intégration du principe bismarckien au système français
Le régime local inspire le Conseil National de la Résistance et l’Ordonnance d’octobre 1945 :
- Financement assis sur la cotisation sur salaire brut
- Gestion confiée à des conseils d’administration élus représentatifs des salariés et des employeurs
- Adhésion obligatoire sans plafond de rémunération, donc extension de l’application du principe de solidarité et d’universalité
MAIS la sécurité sociale française remet en place le dispositif de TICKET MODÉRATEUR utilisé par les assurances en France pendant l’entre-deux guerres.
Mise en place du régime local
L’opposition soutenue de la population en Alsace-Moselle (3 départements) donne lieu à un accord : à titre transitoire (décret du 12 juin 1946), hospitalisation remboursée à 100 %, autres soins à 90 %, avec cotisation augmentée de 2 %.
Sous l’effet des progrès médicaux, du vieillissement de la population, de la crise économique le régime local entre en déficit, les organisations syndicales font des propositions et le président du CES d’Alsace Raymond Baltenweck rend un rapport sur les réformes à engager : instance de gestion unique confiée aux contributeurs et aux bénéficiaires.
Loi du 25 juillet 1994 et décret du 31 mars 1995 : Conseil d’administration doté de la capacité de fixer les cotisations dans une fourchette de 0,75 à 2,5 % du salaire brut total non plafonné, de déterminer la nature des prestations prises en charge et les taux, de prendre les mesures permettant d’assurer l’équilibre financier, de désigner les organes de direction.
Composition : salariés selon représentativité constatée aux élections professionnelles, voix consultatives dont 4 représentants des employeurs
La cotisation est uniquement salariale, il n’y a pas de cotisation prétendue patronale .
Une reconnaissance constitutionnelle en 2011
Le 5 août 2011, à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel juge que « la différence de traitement résultant du particularisme du droit local … ne peut être critiquée sur le fondement du principe constitutionnel d’égalité devant la loi » : tant qu’elles n’ont pas été remplacées par les dispositions de droit commun ou harmonisées avec elles, des dispositions législatives et réglementaires particulières aux trois départements peuvent demeurer en vigueur.
Bilan de fonctionnement
- Taux de cotisation actuel : 1,5 %C’est à ce (petit) prix que le régime local assure un complément à la prise en charge par le régime général des prestations en nature (soins de ville, hospitalisation, médicaments), dans la limite des tarifs de la sécurité sociale, ce qui représente un large champ de participation quand on pense à la lourdeur du ticket modérateur appliqué par le régime général (20, 30, 35, 40, et jusqu’à70%). Nous sommes loin des tarifs discriminatoires pratiqués par les complémentaires permettant aux plus aisés de se payer la meilleure couverture.
- Réserves financières : 8 mois de fonctionnement
- Actions de prévention : 2,5 millions d’euros
- Solidarité intergénérationnelle : 30 % de retraités exonérés de cotisation
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