Une leçon de l’Italie – la commercialisation des services de santé peut tuer.

20 août 2021 par Internationale des Services Publics By Rosa Pavanelli et Rossella De Falco

En février 2021, le taux de mortalité (CFR) du COVID-19 en Lombardie (5,7%) était parmi les plus élevés au monde, doublant la moyenne italienne de 2,4% ou celle de la Vénétie (3,0%).  

Comment est-il possible que la Lombardie, l’une des régions les plus riches d’Italie et d’Europe, ait échoué de manière si frappante dans sa réponse à la pandémie, par rapport à d’autres régions et pays ?

Tout d’abord, la Lombardie s’est concentrée sur le traitement des patients aigus dans les grands hôpitaux, négligeant le dépistage et les prélèvements massifs sur le terrain, qui, en Vénétie, se sont avérés être la stratégie la plus efficace pour éteindre les épidémies.

Deux mois après le premier cas, au 1er avril 2020, seuls 43,5 % des patients étaient traités en isolement à domicile, alors qu’en Vénétie, cet indicateur atteignait 74,9 %.

Deuxièmement, la Lombardie a dû renégocier les services fournis dans le secteur privé accrédité et sous contrat, qui représente 40 % des prestataires de soins de santé de la région, perdant des semaines alors que même les heures coûtent des vies humaines.

Enfin, la Lombardie n’a pu activer que 14 lits de soins intensifs pour 100 000 habitants, soit moins que la moyenne italienne de 15 pour 100 000 et contre 20 pour 100 000 en Vénétie. La Lombardie étant l’une des régions les plus riches, une explication possible est que les soins intensifs représentent une branche moins rémunératrice au sein de la tarification nationale des services de santé, ou plus risquée, et sont donc moins intéressants comme investissement pour un partenaire privé. En effet, seuls 7% des lits en pneumologie sont couverts par le secteur privé, le reste étant couvert par le secteur public.  

Ces trois échecs ne sont pas le fruit de la malchance : les difficultés de la Lombardie résultent d’années de choix politiques orientés vers la privatisation progressive des soins de santé, et sont une démonstration tragique des défaillances du marché lorsqu’il s’agit de sauver des vies. Dans un rapport récent, l’organisation internationale Global Initative for Economic, Social and Cultural Rights a examiné comment la privatisation des soins de santé en Lombardie, à partir de la loi régionale Formigoni de 1997 (n.31 du 11/7/1997), a eu de fortes répercussions sur la réponse défaillante à la pandémie, par rapport à d’autres régions. Fondé sur la rhétorique de la liberté de choix du patient, le système lombard a conduit à la déprogrammation des soins primaires et de la prévention : selon les données du Ministère de la Santé, la Lombardie a l’une des plus faibles densités de médecins de famille en Italie (un médecin de famille pour 1413 habitants, contre une moyenne nationale de un pour 1232) et seulement un laboratoire de santé publique pour 1,2 million d’habitants, contre un pour 500 000 en Vénétie et une moyenne nationale de 600 000. 

Comme le démontre l’expérience de la Lombardie, le droit à la santé ne peut être assuré sans un système de santé publique solide et de qualité, contrôlé démocratiquement et axé sur la réalisation du droit à la santé, plutôt que sur les profits et autres objectifs mercantiles. 

 

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